Il y a bambou et bambou !


Bonjour !

Suite à l'article de Lola sur les lingettes lavables en fibres de bambou, j'aimerais apporter une petite (grosse) précision : il y a bambou et bambou !!!


A l'heure actuelle, une seule entreprise chinoise produit et commercialise des fibres de bambou naturelles produites avec des méthodes telles que la vapeur et l'ébullition. Avec un prix de revient beaucoup plus élevé que celui de la viscose de bambou, cette matière reste donc très marginale et réservée à des produits hauts de gamme.

Les textiles réalisés à base de fibres de bambou, souvent mélangées avec une autre fibre telle que le coton, le lin..., sont des produits de luxe.
On peut, sans rougir, offrir des lingettes en bambou pour un anniversaire !!

L'aspect est un peu brut. Un peu comme du lin. mais au fur et à mesure des lavages, les fibres s'assouplissent.

Mais jamais, jamais, la fibre de bambous aura l'aspect de la microfibre !
Et c'est là tout le problème. Le greenwashing du bambou.

Car il y a du vrai bambou et du faux bambou ? Hélas, oui !


Fibres de bambou au microscope


Fibres de bambou : que disent les étiquettes ?


En ce qui concerne le bambou, il n’y a pas dénomination officielle mais l’AFNOR a publié des recommandations : il peut y avoir 2 sortes d’étiquetage selon le mode d’exploitation du bambou :

- Soit les fibres sont issues du liber de la plante ou de parties séchées et découpées de la plante, on obtient alors une fibre naturelle que l’on peut étiqueter “fibres de bambou“.

Ce cas est relativement rare et il n’y a en fait que très peu de fibres de bambou sur le marché.


- Soit les fibres de bambou sont fabriquées à partir de la cellulose régénérée du bambou et transformées par les procédés “viscose” ou “lyocell”, on obtient alors une fibre artificielle que l’on doit étiqueter “viscose” ou “lyocell” (seul). Il s’agit du cas de loin le plus fréquent.
La mention “viscose (bambou) ou lyocell (bambou) ou viscose de bambou ne doit pas exister.


Bambou, fibres de bambou et feutrine de bambou



Un peu de chimie

Comment le bambou peut-il donner ces fils souples et soyeux ? On imagine naïvement une technique voisine du rouissage, comme pour le lin. Une méthode écologique qui permet de tirer du chaume des fibres naturelles utilisables. Par quel procédé obtient-on ces fibres aussi douces et fines que le coton et la soie ?

En fait elle ne peut pas !!!

 Les industriels et les fabricants interrogés sont restés muets ou se sont retranchés derrière des secrets de fabrication.


Dans le cas des vraies fibres de bambou, les fibres de bambou sont extraits par aiguilletage mécanique et grattage ou par le biais d'un processus d'explosion de vapeur où le bambou est injecté avec de la vapeur et mis sous pression, puis exposé à l'oxygène.

Cette action mécanique est couplée avec une action enzymatique.

Les enzymes impliquées dans la dégradation de la cellulose, appelées cellulases, sont majoritairement sécrétées par les champignons (Trichoderma reesei). Cependant, aucune enzyme seule n'est capable de dégrader entièrement la cellulose et une hydrolyse complète nécessite l'action synergique de plusieurs types de cellulases.

Les endoglucanases qui coupent aléatoirement les chaînes de cellulose majoritairement au niveau des zones amorphes générant de nouvelles extrémités de chaînes. Elles sont responsables de la diminution du degré de polymérisation et permettent de créer de nouveaux bouts de chaînes pour l'attaque par les cellobiohydrolases.

Les cellobiohydrolases ou exoglucanases qui agissent de façon processive sur les extrémités libres des chaînes de cellulose libérant du cellobiose. On peut distinguer deux types de cellobiohydrolases :

- CBHI qui agit sur les bouts de chaînes réducteurs.
- CBHII qui agit sur les bouts de chaînes non réducteurs.
On peut aussi faire intervenir une troisième famille d'enzymes les β-glucosidases qui hydrolysent le cellobiose et dans une moindre mesure les cellodextrines solubles, en glucose.
Mais là, c'est plus pour l'obtention de matériaux composites comme de la vaisselle ou des bio plastiques.


En fait, la vraie fibre de bambou, ça ressemble à ça !!




Vous êtes toujours là ?
Oui ! Alors on continu ! Par contre là, ça va faire mal !



La viscose de bambou


 La viscose est une fibre artificielle obtenue par transformation de la cellulose des végétaux. Le procédé de fabrication est inventé en 1884 par le Français Hilaire de Chardonnet. Il a été breveté en 1892 au Royaume Uni par Cross, Bevan et Beadle. C’est donc une nouveauté âgée de plus de cent ans. La définition internationale précise que la viscose est une fibre manufacturée dans laquelle divers substituts ont remplacé un maximum de 15% des hydrogènes des groupes hydroxyles.

Les méthodes de fabrication de la viscose sont actuellement dérivées du procédé original. Pour simplifier, c’est une recette de cuisine dont la matière première est la cellulose présente dans les végétaux. Cette cellulose provient du bois ou d’autres végétaux, elle est débarrassée de sa lignine, des hydrates de carbone et des impuretés et devient cellulose purifiée.

 Mélangée à de la soude caustique elle est transformée en sel sodique de cellulose puis en xanthate qui est pressé et déchargé des excès de soude. A ce stade après redissolution dans de l’hydroxyde de soude, on obtient une solution visqueuse nommée viscose.

 Par addition de disulfure de carbone, elle est rendue plus fluide, puis elle est dégazée et filtrée. Elle est ensuite forcée à travers une plaque percée de trous minuscules. Il en sort des filaments qui sont aussitôt formés en fils. Les feuilles ou les rouleaux de cellophane sont réalisés de cette façon en forçant la viscose à travers une fente très étroite.


Une fibre naturellement bactéricide ?

 Certainement pas de façon naturelle. Si c’était vrai, les professions médicales utiliseraient cette propriété depuis longtemps. C’est l’adjonction à la viscose d’un puissant bactéricide : l’ammonium quaternaire qui permet pour un certain temps d’inhiber ou de ralentir la multiplication des bactéries sur le produit ainsi traité, mais cet effet diminue au cours des lavages successifs.


Ce n’est pas sans raison que les industries européennes de la viscose ont été délocalisées vers des pays où les règles de protection de l’environnement et du personnel sont quasi inexistantes ou très laxistes. Les procédés de fabrication sont très gourmands en eau. Les effluents toujours très chargés sont souvent directement rejetés dans les cours d’eau. Le disulfure de carbone est hautement toxique. L’exposition au disulfure entraîne le sulfocarbonisme et un cortège de maladies professionnelles très invalidantes, connues et bien décrites.


Que dire au passage, de la fabrication des parquets en lames de bambou encollées au pinceau à la résorcine phénol ou aux colles formaldéhyde par des enfants travaillant pour des salaires de misère sans aucune protection ? Ce parquet, longtemps après sa pose, relarguera des vapeurs toxiques dans votre chambre ou votre salon. Si ce parquet était réalisé en chêne massif ou en châtaigner, il serait dédaigné des xylophages, vous garantirait un intérieur non pollué et pourrait durer quelques centaines d’années.

Et pire, l’examen au microscope de certains tissus annoncés 100% bambou permet d’affirmer qu’aucune fibre de bambou n’est présente. L’analyse de quelques échantillons en laboratoire confirme que ce textile est en réalité de la viscose ou de la rayonne, pur produit issu de la chimie, c’est-à-dire 100% artificiel.


 Afin de rétablir la vérité, il semble nécessaire de dire que la viscose de bambou existe et qu’elle est mise en avant par une publicité trompeuse. Il faut préciser que c’est une fibre totalement artificielle réalisée avec des techniques polluantes pour le plus grand bénéfice des industriels asiatiques du textile et des importateurs occidentaux.

 Le 6 octobre 1988, David Farrelly prophétisait :

« Certains gagneront beaucoup d’argent avec les bambous, mais ce ne sera pas ceux qui les plantent ».



J'espère que cet article vous a intéressé.
Toujours bien lire les étiquettes pour mieux consommer.

Emma





1 commentaire:

JG a dit…

Bonjour,
Je suis très intéressée par vos connaissances sur le sujet, en particulier, concernant la fibre de bambou réelle, son extraction, son utilisation. Pouvez-vous m'eclairer ? Merci